- Les gouvernements comptent beaucoup sur les serveurs basés aux États-Unis, en particulier dans des régions comme l’Amérique latine.
- Les gouvernements qui utilisent principalement leur infrastructure ont souvent recours à un seul réseau pour la majeure partie de leur contenu. En revanche, celles qui font appel à des fournisseurs tiers ont tendance à diversifier leurs activités sur plusieurs réseaux.
- Les gouvernements peuvent mieux servir leurs citoyens tout en protégeant leurs actifs numériques en évaluant les compromis entre les fournisseurs tiers et le contrôle interne.
Avec près de deux milliards de visites par mois sur les sites web fédéraux aux États-Unis et 77 % des citoyens de la région Asie-Pacifique qui utilisent des plateformes numériques pour des services essentiels, l’impact de l’administration numérique est indéniable. Mais qu’est-ce qui permet à ces services numériques de fonctionner sans heurts et en toute sécurité ?
Une nouvelle étude menée par le groupe de recherche du professeur Bustamante à l’université Northwestern examine, pour la première fois, l’infrastructure qui sous-tend les sites web publics dans le monde entier. Elle met en lumière la manière dont les gouvernements hébergent leurs services numériques et les compromis auxquels ils sont confrontés lorsqu’ils décident où et comment héberger leur infrastructure numérique.
Deux tendances qui façonnent les stratégies d’hébergement des administrations publiques
Deux tendances mondiales façonnent actuellement la manière dont les gouvernements hébergent leurs plateformes numériques :
- Adoption de l’hébergement par des tiers : Comme d’autres secteurs, les gouvernements se tournent de plus en plus vers des fournisseurs de services tiers, tels que Cloudflare et Amazon, pour héberger leur contenu. Ces fournisseurs offrent des avantages indéniables, notamment une expertise inégalée, une évolutivité, une haute disponibilité, une sécurité solide et la possibilité de réaliser d’importantes économies.
- Pousser à la souveraineté numérique : Simultanément, un mouvement croissant en faveur de la souveraineté numérique pousse les gouvernements à conserver le contrôle de leurs données. Cette tendance est renforcée par des cadres juridiques tels que le GDPR en Europe, le CCPA en Californie et le LGPD au Brésil, qui mettent tous l’accent sur la protection des données et la localisation. Bien que certains fournisseurs de cloud (comme AWS, avec ses solutions sur mesure pour le gouvernement américain) se soient adaptés pour répondre à ces demandes, les services tiers restent la propriété de l’étranger pour de nombreux pays, ce qui soulève des inquiétudes quant à la souveraineté des données et à la dépendance à l’égard des fournisseurs externes.
Ces deux forces placent les gouvernements devant un défi complexe : tirer parti des avantages de l’expertise et de l’évolutivité des tiers tout en répondant à l’impératif de préserver la souveraineté des données et de garder le contrôle sur leurs actifs numériques.
Comment les gouvernements hébergent-ils leurs services numériques ?
L’étude a analysé plus d’un million de ressources web uniques provenant de sites web gouvernementaux de 61 pays. Les résultats mettent en évidence une dépendance généralisée à l’égard d’une infrastructure tierce et des exemples notables de flux de données transfrontaliers et de centralisation de l’infrastructure. Par exemple :
Les fournisseurs tiers dominent – 62 % des URL gouvernementales dans le monde sont hébergées par des fournisseurs tiers.
Hébergement national ou international – Alors que 87 % de tous les URL gouvernementaux sont desservis par des serveurs nationaux, les différences régionales sont frappantes. L’Afrique subsaharienne, par exemple, sert près de la moitié de ses URL à partir de serveurs internationaux, contre moins de 2 % en Amérique du Nord (figure 1).
Dépendances transfrontalières en matière d’hébergement – La dépendance à l’égard des serveurs basés aux États-Unis est importante, en particulier dans des régions comme l’Amérique latine. Par exemple, le Mexique héberge 79 % des URL de son gouvernement aux États-Unis, tandis que le Costa Rica s’appuie sur des serveurs américains pour la moitié de ses services gouvernementaux.
Les liens historiques influencent les décisions d’hébergement ; par exemple, le Maroc, ancien protectorat français, continue d’héberger environ un tiers des URL de son gouvernement en France.
La proximité géographique joue également un rôle, comme en Nouvelle-Zélande, où environ 40 % des URL gouvernementales sont hébergées en Australie. Cela est probablement dû aux liens étroits entre les deux pays et à l’infrastructure locale limitée en Nouvelle-Zélande.
Centralisation de l’infrastructure – Cloudflare fournit des services à 49 gouvernements dans le monde (Figure 2) et héberge jusqu’à 72% du contenu gouvernemental d’un seul pays.
Diversité de l’infrastructure – Les gouvernements qui utilisent principalement leur infrastructure ont souvent recours à un seul réseau pour la majeure partie de leur contenu. En revanche, celles qui font appel à des fournisseurs tiers ont tendance à diversifier leurs activités sur plusieurs réseaux.
L’importance de ces choix
Les décisions des gouvernements concernant l’hébergement de leurs services numériques ont des implications considérables. Elles influencent les performances, la résilience et la sécurité des sites web, ainsi que la souveraineté et la confidentialité des données gouvernementales.
Ces décisions ont une incidence sur l’accès des citoyens aux services essentiels et sur la protection des informations sensibles. Pour les décideurs politiques, elles soulignent la nécessité de trouver un juste équilibre entre l’efficacité et l’expertise, d’une part, et le contrôle et l’indépendance, d’autre part.
Les résultats de cette étude soulignent l’importance de stratégies réfléchies lorsque les gouvernements adoptent des solutions numériques. Les gouvernements peuvent mieux servir leurs citoyens tout en protégeant leurs actifs numériques en évaluant les compromis entre les fournisseurs tiers et le contrôle interne.
L’administration numérique est l’avenir – s’assurer qu’elle repose sur des bases sûres, équitables et résilientes est un défi que nous devons relever ensemble.
Lisez notre document pour plus d’informations.
Collaborateurs : Esteban Carisimo (Northwestern University), Lukas De Angelis Riva (Universidad de Buenos Aires), Mauricio Buzzone (Universidad de Buenos Aires), Fabián E. Bustamante (Northwestern University), Ihsan Ayyub Qazi (LUMS) et Mariano G. Beiró (Universidad de San Andrés, CONICET).
Rashna Kumar est en dernière année de doctorat au sein du groupe de recherche AquaLab du professeur Bustamante, au département d’informatique de l’université Northwestern.
Les opinions exprimées par les auteurs de ce blog sont les leurs et ne reflètent pas nécessairement celles de l’Internet Society.