Sur Pulse, nous rassemblons diverses mesures pour illustrer le déploiement de technologies internet essentielles au niveau national et sur les réseaux mondiaux. Dans ce billet, nous examinerons les changements notables intervenus dans le déploiement d’IPv6 dans chaque région au cours des 12 derniers mois et ce à quoi nous pouvons nous attendre en 2024.
Le déploiement d’IPv6 n’a jamais autant augmenté dans le monde depuis 2018
En 2023, le taux de déploiement de l’IPv6 a connu sa plus forte augmentation depuis 2018, passant de 34 % à 39 % au niveau mondial – le déploiement de l’IPv6 a augmenté en moyenne de 3,5 % chaque année depuis décembre 2017.
Selon APNIC Labs, les gains les plus importants ont été mesurés dans la région Asie-Pacifique, où le déploiement d’IPv6 en Asie est passé de 37,2 % à la fin de 2022 à 42,3 % à la fin de 2023, et dans le même temps, l’Océanie est passée de 31,9 % à 37,2 %.
Dans le même temps, l’Asie a dépassé les Amériques pour le pourcentage le plus élevé de déploiement de l’IPv6, tandis que l’Océanie a creusé l’écart avec l’Europe, qui a terminé l’année avec 31,4 %.
Figure 1 – Capacité IPv6 par région à la fin de 2023. Source : APNIC Labs : APNIC Labs.
Asie-Pacifique
À la fin de l’année 2023, dix pays d’Asie-Pacifique figuraient parmi les 20 premiers pays du monde pour le déploiement de l’IPv6, soit le plus grand nombre de toutes les régions, et 31 de ses 76 pays et territoires ont terminé l’année avec un taux de déploiement de l’IPv6 supérieur à 10 %.
De tous les pays et territoires de la région, c’est la Mongolie qui a connu le bond le plus important, passant de 4,5 % à 29,8 %, grâce à son opérateur historique, Unitel, qui est devenu le premier grand réseau à déployer l’IPv6 dans le pays.
Lire : Unitel lance l’IPv6 en Mongolie.
D’autres augmentations notables ont été observées au Népal (+15,2%), au Bangladesh (+11,3%), à Taiwan (10,5%), au Bhoutan (10,3%), au Viêt Nam (+9,2%), au Pakistan et en Malaisie (+8,6%), ainsi qu’en Polynésie française, en Israël et au Japon (+8,4%).
Si les augmentations de l’Inde (+4%) et de la Chine (+4,8%) peuvent sembler modestes par rapport à ce qui précède et à ce qu’elles ont fait les années précédentes, le fait qu’elles se voient attribuer le plus grand nombre de réseaux de tous les pays de la région signifie que toute augmentation est significative. L’Inde a également renforcé sa position de premier pays au monde en ce qui concerne l’utilisation de l’IPv6.
En 2024, nous surveillerons de près si d’autres réseaux au Bahreïn, au Bangladesh, en Mongolie, en Papouasie-Nouvelle-Guinée et au Qatar suivront l’exemple des grands réseaux qui ont été les premiers à commencer à déployer l’IPv6 en 2023 dans leur pays. Nous nous intéresserons également à l’Indonésie qui, en tant que troisième pays de la région pour le nombre de réseaux attribués, a un pourcentage de déploiement IPv6 modeste de 13,5 %.
L’Europe
L’Europe a franchi la barre des 30 % de déploiement IPv6 en 2023, terminant l’année à 31,4 %, contre 28 % à la fin de 2022. Elle a plus que doublé son déploiement IPv6 au cours des cinq dernières années.
Alors que la Belgique occupait la première place en Europe depuis 2015, la France l’a dépassée, même si ce n’est que pour quelques semaines, en 2023, grâce notamment à son deuxième opérateur, la Société Française Du Radiotéléphone(AS15557), qui a poursuivi ses gains substantiels en 2022 pour rejoindre les trois autres plus grands opérateurs français à un niveau de déploiement d’IPv6 égal ou supérieur à 60%.
On peut imaginer que d’ici à la fin de 2024, les quatre premiers opérateurs français auront déployé l’IPv6 sur au moins 80 % de leurs réseaux.
De tous les pays d’Europe, c’est la Norvège qui a enregistré le bond le plus important dans le déploiement de l’IPv6, passant de 25,9 % à la fin de 2022 à 40,8 % à la fin de 2023, grâce à son plus grand opérateur, ALTIBOX(AS29695), qui a plus que doublé son déploiement IPv6 pour terminer l’année à 60 %. Voir les données pour la Norvège.
Son voisin, la Suède, a également vu son déploiement IPv6 presque doubler d’ici à 2023, passant de 11,7 à 22,5 %, grâce à son principal opérateur, Telia(AS3301), qui a accéléré sa transition vers IPv6 au cours du dernier trimestre de l’année (de 9,7 à 26 %). Voir les données pour la Suède.
Le mouvement le plus significatif provient des pays classés 5ème, 6ème et 8ème pour le plus grand nombre de réseaux attribués dans la région : Espagne, Italie et Ukraine.
Comme indiqué sur Pulse plus tôt dans l’année, le plus grand opérateur espagnol, Telefonica (AS3352), a entamé sa transition vers l’IPv6, passant de 0 à 17,5 %, ce qui s’est traduit par un déploiement de l’IPv6 dans le pays passant de 4,3 % à 9,4 %. Voir les données pour l’Espagne.
L’Italie a également doublé son déploiement IPv6, qui est passé de 6,8 à 13,6 % au cours de l’année, grâce à deux de ses trois principaux fournisseurs, Vodafone Italia(AS30722) et WindTre(AS1267), qui ont entamé leur transition vers l’IPv6. Voir les données pour l’Italie.
Ces résultats sont bien inférieurs à ceux obtenus par l’Ukraine en 2023, qui a fait passer son déploiement global d’IPv6 de 0 à 13 % (il est tombé à 9,6 % à la fin de l’année) dans le contexte de la guerre qui l’oppose à la Russie. Là encore, cette augmentation est due au plus grand opérateur du pays, Kyivstar(AS15895), qui a commencé à passer à l’IPv6 en septembre 2022. Voir les données pour l’Ukraine.
Il convient de noter que si Kyivstar a déployé l’IPv6 sur près de la moitié de son réseau, cela n’a augmenté que de 13 % le pourcentage global de déploiement de l’IPv6 en Ukraine. Cela témoigne de l’excellente diversité des fournisseurs d’accès Internet de l’Ukraine (selon le rapport national Pulse pour l’Ukraine), qui a une influence sur l’indice global de résilience de l’Internet, que nous suivons depuis le début de la guerre.
Lire : Étude de cas : Ukraine – Un modèle de résilience de l’internet
À l’horizon 2024, nous nous attendons à ce que les pays susmentionnés continuent d’augmenter leur taux de déploiement de l’IPv6 et incitent les réseaux plus petits de leur pays à suivre leur exemple.
Nous sommes également intéressés de voir comment l’annonce récente du gouvernement tchèque, selon laquelle tous les réseaux gouvernementaux devront fonctionner uniquement en IPv6 d’ici 2032, affectera ses chiffres de déploiement IPv6 (il a terminé l’année au 20e rang en Europe, avec 21,6 % de sa capacité de réseau globale capable d’IPv6) et si les gouvernements d’autres pays d’Europe et du monde entier suivront son exemple. Les gouvernements jouent un rôle essentiel dans l’adoption des technologies essentielles, à la fois en tant que décideurs politiques et en tant que clients de l’internet – dans la plupart des pays, les gouvernements comptent parmi les principaux clients des technologies de l’information.
Amériques
Après avoir été à la pointe du déploiement de l’IPv6 pendant une décennie, le déploiement de l’IPv6 dans les Amériques a atteint un plateau significatif en 2023, n’augmentant que de 1,7 %.
Parmi les dix pays les plus peuplés de la région, les États-Unis (54 %), le Mexique (48 %), la Colombie (54 %), le Canada (36 %) et le Pérou (28 %) n’ont guère progressé dans le déploiement de l’IPv6 au cours des douze derniers mois. En revanche, l’Argentine (+5,5%), le Brésil (+5,4%), le Chili (3,2%) et l’Équateur (3%) ont continué à progresser.
Alors que le Venezuela se classe parmi les derniers pour le déploiement d’IPv6 des 55 pays des Amériques (2,5 %), un réseau (AS264628) a augmenté son pourcentage de déploiement individuel d’IPv6 de 18 % à 39 % en 2023, contribuant ainsi à hauteur de 1,5 % au pourcentage national.
Historiquement, les petits pays ne figurent pas dans la liste des pays où le pourcentage de déploiement de l’IPv6 est le plus important, car il n’y a pas encore eu d’argument commercial fort pour les inciter à le déployer, étant donné que la plupart d’entre eux disposent de suffisamment d’adresses IPv4 pour répondre aux besoins de leur base d’utilisateurs plus restreinte. Toutefois, plusieurs petits pays d’Amérique ont fait un bond considérable dans le classement en 2023, grâce à l’une de leurs deux plus grandes sociétés de télécommunications qui a commencé à déployer l’IPv6.
La plus importante de ces hausses est celle de Domenica, qui, grâce au déploiement de l’IPv6 sur son réseau par la plus grande entreprise de télécommunications, SATTEL(AS40945), est passée de moins de 1 % à 45,8 %. Elle se classe désormais au 8e rang des Amériques et au 31e rang mondial.
Les îles Turks et Caicos (+27%), Anguilla (+24%), la République dominicaine (+10%), le Paraguay (+9%), le Guatemala (8,7%) et le Costa Rica (+8,5%) ont également fait des bonds impressionnants. Il sera intéressant de voir si d’autres opérateurs de ces pays suivront l’exemple des réseaux qui ont déployé l’IPv6 et si les opérateurs d’autres pays plus petits ne déploient que peu ou pas du tout l’IPv6.
Afrique
L’Afrique a terminé l’année avec, de loin, le pourcentage de déploiement IPv6 le plus faible (2 %). Toutefois, plusieurs augmentations notables ont été observées à Mayotte et à la Réunion grâce aux déploiements de France Télécom-Orange dans ces deux pays, ainsi que les premiers signes de déploiement de l’IPv6 au Sénégal et en Tunisie, grâce au deuxième (Cloudflare) et au plus grand réseau (Tunisie Telecom) qui déploient l’IPv6 dans leurs pays respectifs.
Dans ce dernier cas, nous nous attendons à ce que le déploiement d’IPv6 augmente encore en 2024, étant donné que Tunisie Telecom est l’opérateur de télécommunications historique en Tunisie et qu’il n’a annoncé son plan de transition vers IPv6 qu’en septembre. Un autre pays que nous surveillerons en 2024 est le Botswana, où l’autorité de régulation a annoncé en novembre qu’elle se fixait pour objectif de convertir complètement le pays d’ici à 2030; moins de 1 % du trafic du pays passe par l’IPv6.
Dans le cas de la Tunisie, nous nous attendons à ce que le déploiement de l’IPv6 augmente encore en 2024, étant donné que l’opérateur historique de télécommunications en Tunisie n’a annoncé son plan de transition vers l’IPv6 qu’en septembre.